Jurisprudence. Quelle est l’autorité compétente en matière de police des déchets sur le site d’une ICPE ?
La Cour de cassation a précisé dans un arrêt récent qui, du préfet ou du maire, était investi des pouvoirs de police lui permettant de prendre les mesures nécessaires à l’élimination des déchets abandonnés sur le site d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE).

Un agent municipal se voit refuser l’accès d’une ICPE
Cette décision est l’occasion de revenir sur les moyens d’actions offerts à l’administration dans le cadre de l’élimination des déchets abandonnés sur le site d’une ICPE.
L’arrêt de la Cour de cassation (Cass. 3e civ., n° 19-23.695 du 1er avril 2021) porte sur les faits suivants.
Un employé municipal se voit refuser l’accès d’une ICPE sur laquelle il souhaitait investiguer un dépôt sauvage de déchets potentiellement polluants.
Il a, sur le fondement de l’article L.7121 du code de l’environnement, obtenu du juge des libertés et de la détention l’autorisation de pénétrer sur le site.
Le titulaire de l’ICPE conteste cette décision. Il estime que seul le préfet, et non le maire, est chargé du contrôle des ICPE. Et que, de ce fait, seuls les agents placés sous l’autorité du préfet peuvent être autorisés à pénétrer sur site.
Élimination de déchets sur une installation ICPE
La question de l’autorité de police compétente en matière de contrôle et d’élimination des déchets présents sur le site d’une ICPE avait déjà été tranchée par le Conseil d’État en 2007.
Dans sa décision, ce dernier avait estimé que la compétence en matière de déchets ICPE était partagée entre le maire et le préfet.
Le maire bénéficiait d’une compétence de principe pour assurer l’élimination des déchets, y compris lorsque ceux-ci se trouvaient sur le site d’une ICPE ou en étaient issus. Le préfet était alors compétent, d’une part en cas de carence du maire et, d’autre part, de manière concurrente au maire, dans le cas de déchets provenant d’une ICPE.
« Disposition particulière »
Depuis cette décision, est entré en vigueur l’article R.541-12-16 du code de l’environnement. Celui-ci précise que, « sans préjudice des dispositions particulières », l’autorité titulaire des pouvoirs de police des déchets sur une installation ICPE est le préfet.
Dans le cas jugé en l’espèce, le juge de la détention et des libertés avait justement considéré que le pouvoir général de police du maire concernant les dépôts sauvages de déchets constituait une « disposition particulière » permettant de retenir sa compétence et non celle du préfet dans le cas de l’abandon de déchets sur une ICPE.
La Cour de cassation a censuré ce jugement. Elle a estimé que le maire détenait une compétence générale de police en matière d’enlèvement des dépôts de déchets mais que le préfet détenait une compétence particulière en cette matière, dans le cas de déchets abandonnés sur le site d’une ICPE.
La procédure de l’article L.171-2 du code de l’environnement
L’arrêt rendu par la Cour de cassation est enfin l’occasion de rappeler l’existence de la procédure de contrôle administratif des installations ICPE prescrite par l’article L.1712 du code de l’environnement.
Cette dernière permet aux agents de contrôle d’une ICPE qui s’en verraient refuser l’accès, de saisir le juge de la détention et des libertés afin qu’il les autorise à pénétrer sur site.
Il semble cohérent que les agents désignés par le juge pour pénétrer sur le site soient ceux qui sont par ailleurs compétents pour procéder aux contrôles à effectuer sur site. Et donc, qu’ils soient des agents placés sous l’autorité du préfet, et non du maire.
C’est ce qu’a confirmé la Cour de cassation dans la décision rendue. Elle a estimé que le juge de la détention et des libertés devait veiller à vérifier la compétence de l’autorité à l’origine de la requête pour pénétrer sur site.
Article extrait du n° 574 de Face au Risque : « L’hydrogène en lumière » (juillet-août 2021).

Sylvain Bergès
Avocat associé chez Racine Avocats
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